Définition d’un minéral
Qu’est-ce qu’un minéral ? Encore aujourd’hui, le terme fait débat. La définition la plus communément admise est celle de l’IMA (International Mineralogical Association), instance internationale décidant de ce qui peut être considéré ou non comme un minéral : « les minéraux sont des solides naturels, homogènes et cristallins, constituant les roches, caractérisés par une composition chimique définie et une structure cristallographique particulière »1.
La définition d’un minéral a constamment évolué au fil du temps. Durant l’Antiquité et le Moyen Âge, c’est le critère de la déformation de la matière qui prévaut : les matériaux divisibles sous le marteau, comme la calcite par exemple, sont distingués de ceux qui sont malléables, comme l’or2.
En 1546, Agricola écrit De natura fossilium, considéré comme le premier traité de minéralogie. Il établit une méthode d’identification qui se base sur différentes propriétés immédiates des minéraux tels que la couleur, l’éclat, la dureté, la densité… mais également le goût ou encore l’odeur !3. A la fin du XVIIIe siècle, l’abbé René Just Haüy et ses disciples refondent la minéralogie à partir de nouvelles nomenclatures. Ils définissent les minéraux selon des critères qui prennent en compte à la fois leur composition chimique et la géométrie de leur structure (les systèmes cristallins). La minéralogie moderne est née4.
Composition chimique et structure cristallographique
Définir un minéral nécessite de prendre en compte deux éléments : sa composition chimique et sa structure cristallographique. La composition chimique désigne les atomes entrant dans la composition d’un minéral. La structure cristallographique désigne la manière dont ces atomes vont s’organiser à l’intérieur de celui-ci.
Prendre en compte ces deux caractéristiques d’un minéral est indispensable. En effet, des minéraux distincts peuvent avoir la même formule chimique, mais des structures cristallographiques différentes. Le graphite et le diamant sont par exemple tous deux uniquement constitués de l’élément C (carbone). Cependant, dans la structure du diamant, un atome de carbone est relié à quatre autres, formant un réseau compact, alors que dans la structure du graphite, un atome de carbone n’a que trois voisins, formant un réseau hexagonal ressemblant à un nid d’abeille. Cette structure des minéraux à l’échelle atomique détermine leurs propriétés macroscopiques : le diamant est considéré comme le minéral le plus dur sur Terre alors que le graphite, friable, laisse une trace noire si on l’appuie sur du papier5.
Une grande diversité de minéraux
Certains experts estiment que seuls les solides cristallisés et inorganiques, formés par un processus géologique, peuvent être considérés comme des minéraux. Cette définition rigoureuse peut par exemple s’appliquer au quartz ou au feldspath, constitués d’agencements atomiques constants et stables qui se répètent presque à l’infini, formant des cristaux. Dans ce cas cependant, comment définir des éléments comme le mercure que l’on trouve sous forme liquide, ou l’ambre, composée d’éléments organiques6 ?
Le mercure natif ne serait en effet pas considéré comme un minéral car il est liquide et, à ce titre, non cristallisé. Pourtant, l’International Mineralogical Association considère que le mercure natif est bel et bien un minéral7. En effet, dans ce liquide, les atomes de mercure sont fortement liés, comme c’est le cas dans un cristal (d’ailleurs, les « cristaux liquides » existent bel et bien dans nos écrans !).
Seulement, si pour un cristal l’agencement des atomes est constant et stable, pour le mercure il varie constamment. Un liquide n’est donc pas si différent d’un cristal : les deux sont organisés différemment, mais à partir des mêmes structures atomiques et moléculaires. L’ambre, quant à elle, n’est pas considérée comme un minéral à proprement parler (de même que le charbon ou le pétrole) car il s’agit d’une résine fossilisée, composée d’un grand nombre de substances organiques différentes intimement mélangées sans composition chimique définie ni structure atomique ordonnée8. Les scientifiques parlent alors de « minéraloïdes »9.
En réalité, les minéraux d’origine purement « minérale » ne constituent qu’une minorité du monde minéral tel que nous le connaissons aujourd’hui. En effet, de nombreuses roches carbonatées telles que les calcaires par exemple sont en grande partie d’origine biologique : elles ont été formées par les restes d’organismes vivants (débris d’os, de coquilles, de carapaces, mais également de végétaux) depuis leur apparition sur terre il y a au moins 3,5 milliards d’années10. Les composés formés en laboratoire ne sont également pas considérés comme minéraux (car non formés par un processus géologique naturel) même si leurs propriétés chimiques et leur structure peuvent être identiques aux minéraux naturels11.
La Minéralogie, une science en constante évolution
Encore aujourd’hui, la minéralogie est une science en constante évolution. A ce jour, environ 5 500 espèces minérales différentes ont été recensées par l’Association Internationale de Minéralogie, et une dizaine d’espèces nouvelles sont découvertes chaque année. Comment est-ce possible ?
Le plus souvent, il s’agit d’espèces microscopiques confinées à un gisement très particulier, ayant connu des épisodes géologiques uniques expliquant alors leur rareté12. Mais le plus important potentiel d’espèces minérales nouvelles réside dans l’étude des minéraux extraterrestres (météorites, astéroïdes, autres corps célestes présents dans notre système tels que Mars ou la Lune13), pour lesquels les progrès techniques autorisent maintenant des études de plus en plus poussées.
Un nouveau champ dans l’exploration de la minéralogie s’est ouvert très récemment : les minéraux de dimension nanométrique (un nanomètre équivaut à un millionième de millimètre), souvent peu ou non cristallisés. Ces espèces sont impossibles à détecter avec les instruments de minéralogie traditionnelle : leur identification requiert des instruments sophistiqués -tels les accélérateurs à rayonnement synchrotron – qui n’ont été développés que très récemment. Ces minéraux restent encore peu connus même s’ils peuvent être abondants dans nos sols, comme les « rouilles vertes » telles la fougérite (identifiée en 1996 en Bretagne près de la ville de Fougères qui lui a donné son nom), qui s’est finalement révélée être un minéral extrêmement commun dans les sols sous nos latitudes14.
[1] www.ima-mineralogy.org/Mission.htm
[2] Q. Bollaert, A. Couturier, L. Lafontaine, H. Lestrelin, C. Loiseau, T. Malleville. Une santé de fer ! Minéraux et santé, de l’Antiquité à nos jours, Paris : Presses des Mines, 2021, p. 22 – 23.
[3] Idem.
[4] La galerie de Minéralogie et de Géologie, ouvrage collectif, Muséum national d’histoire naturelle, Paris, 2020, p. 57.
[5] Q. Bollaert, A. Couturier, L. Lafontaine, H. Lestrelin, C. Loiseau, T. Malleville. Une santé de fer ! Minéraux et santé, de l’Antiquité à nos jours, Paris : Presses des Mines, 2021, p. 22 – 23.
[6] F. Farges. À la découverte des minéraux et pierres précieuses – Minéraux et gemmes, sachez les reconnaître, Paris, Dunod, 2018, p. 9.
[7] Liste officielle des minéraux approuvés par l’IMA (mise à jour en janvier 2022) : http://cnmnc.main.jp/
[8] Sabina, Ann P.. « Minéral ». l’Encyclopédie Canadienne, 04 mars 2015, Historica Canada.
[9] F. Farges. À la découverte des minéraux et pierres précieuses – Minéraux et gemmes, sachez les reconnaître, Paris, Dunod, 2018, p. 11.
[10] F. Farges. À la découverte des minéraux et pierres précieuses – Minéraux et gemmes, sachez les reconnaître, Paris, Dunod, 2018, p. 9.
[11] Sabina, Ann P.. « Minéral ». l’Encyclopédie Canadienne, 04 mars 2015, Historica Canada.
[12] O. Tschauner et al. Discovery of davemaoïte, CaSiO3-perovskite, as a mineral from the lower mantle, Science (Vol. 374, n° 6569), pp. 891-894.
[13] J.J.Bellucci, A. A.Nemchin, M.Grange, K.L.Robinson, G.Collins, M.J.Whitehouse, J.F.Snape, M.D.Norman, D.A.Kring, Terrestrial-like zircon in a clast from an Apollo 14 breccia, Earth and Planetary Science Letters, Volume 510, 15 March 2019, Pages 173-185.
[14] F. Farges. À la découverte des minéraux et pierres précieuses – Minéraux et gemmes, sachez les reconnaître, Paris, Dunod, 2018, p. 14.